Les pensées improbables


LA PHILOSOPHIE DANS LA PISCINE (Les pensées improbables de Ray Banana)
Pour certains c'est dans le boudoir, pour d'autres dans la piscine

jeudi 22 décembre 2011

28. Le moteur du progrès


Notons l'appui nonchalant sur le dossier du fauteuil. Décidément, Ray aime bien cette position, très seyante pour asséner à ses contradicteurs l'argument final et imparable, ou simplement faire le malin en société. Car celui que l'on surnomme parfois "l'Oscar Wilde de la Côte Ouest", ou "le Diogène de McCoy's Valley" ne dédaigne pas d'épater son voisin à l'occasion.

McCoy's Valley est un lieu-dit de l'île de Pitcairn situé à 1 km de Adamstown, la capitale et unique agglomération. A l'extrémité de la vallée est située la station de radio, d'où Ray diffuse ses "questions qui fâchent" aussi loin qu'il le peut dans le Pacifique sud.


Au XXème siècle la station était animée par Floyd McCoy, qui émettait tous les mardis et samedis à 7 heures GMT.

Floyd McCoy à sa radio en 1957 

Son ancêtre, le mutin William McCoy, qui donna son nom à la vallée, périt le 20 avril 1798 d'une chute mortelle due à sa consommation excessive de l'alcool qu'il distillait, à partir des racines d'une plante locale appelée ti, dans la bouilloire de cuivre du Bounty.
Si l'on étudie tous les noms de lieu sur la carte de Pitcairn, on découvre qu'un très grand nombre d'entre eux évoque de semblables chutes mortelles dans les flots, la côte de l'île étant pour l'essentiel constituée de falaises extrêmement escarpées. (NdT)

Mais ceci fera peut-être l'objet d'un autre chapitre.

mercredi 14 décembre 2011

You can't evict an idea whose time has come


Bien sûr, comme nous le rappelle Ray, qui n'a pas une vaste bibliothèque pour rien, cette phrase nous vient initialement de notre Victor Hugo national. Il en donne ici la version originale. De l'avis de Ray, Victor ne renierait en rien l'usage qu'en font les Occupy Wall Street.


Ray, d'ailleurs, ne connaît pas son Hugo par coeur, car la citation (dans Histoire d'un crime) serait plutôt: "On peut résister à l'invasion d'une armée, mais non à l'invasion d'idées dont le temps est venu." Il est difficile d'en trouver une transcription exacte sur internet.
Bon, la formulation de Ray est plus jolie, mais ce qui compte est bien évidemment, dans les deux cas, la fin: ... dont le temps est venu.

Notons, que comme toutes les bonnes formules, celle-ci a toute les chances d'être galvaudée tôt ou tard. Comme dans cette utilisation qu'en fait The Economist pour un article intitulé An idea whose time has come: Entrepreneurialism has become cool.
L'entreprenariat, nous dit-on, va sauver le monde, en s'appuyant sur ce trio d'inventions que sont l'ordinateur individuel, internet et le téléphone mobile.
Cool.
Méfions nous des formules.

Si l'inconvénient des formules est de pouvoir être mises à toutes les sauces, aussi belles soient-elles, et celle-ci l'est assez, les idées qu'elles peuvent recouvrir ont elles un avantage certain, comme nous le rappellent Alan Moore et David Lloyd.


Elles sont à l'épreuve des balles.

lundi 28 novembre 2011

La beauté convulsive

Et quand il eut passé le pont, les fantômes vinrent à sa rencontre.

La phrase du jour - enfin, des trois ou quatre derniers, ou de l'année, comme on veut, car cela fait un bout de temps qu'elle hante Ray.
En quoi il ne brille pas par son originalité, car elle a aussi hanté l'imaginaire des surréalistes, depuis 1929, et de bien d'autres:
"Pendant quelques semaines, nous nous sommes répété, comme une expression pure de la beauté convulsive, ce sous-titre français: Passé le pont, les fantômes vinrent à sa rencontre." (Georges Sadoul)


Il nous laisse chercher d'où elle est extraite, recherche qui sera rapidement couronnée de succès, avec la technologie moderne.

Le tag Blake et Mortimer de ce billet fait allusion à ceci.

lundi 14 novembre 2011

Autumn leaves


Another home made translation for Ray's english speaking readers. It's been a long time.

When he came out to get his newspaper this morning, Ray found this on his doorstep instead.
The autumn wind lifts strange leaves this year, and it's no small breeze.
They fly over to Pitcairn Island, and the Mojave desert, where Ray is often seen.


Feuilles d'automne


En allant prendre son journal ce matin, Ray Banana a trouvé ceci à la place sur le pas de sa porte.

L'automne fait voler de drôles de feuilles cette année, et il y a une sacrée brise. Il en vient jusqu'à Pitcairn Island, et dans le désert Mojave, où Ray a aussi ses habitudes.


jeudi 10 novembre 2011

Dieu, la banane et un encombrant homonyme

Une brève recherche internet sur ce nom "Ray Banana" risque de mener rapidement à ce résultat: Ray"Banana man"Comfort, un pasteur évangéliste originaire de Nouvelle Zélande.
Qui en plus porte la moustache!

Ray s'en excuse, qui ne pouvait imaginer que ce Ray Comfort (comme l'avaient appelé ses parents, totalement innocents en l'occurrence) se verrait accoler le surnom de Banana man, et viendrait ainsi lui faire de l'ombre. Le surnom en question, ce personnage l'a gagné quand il s'est livré à une intéressante démonstration tendant à prouver, à l'aide d'une banane, la véracité du créationnisme et donc l'existence de Dieu.

Le pauvre homme a été suffisamment moqué pour ne pas ajouter à son malheur en détaillant ici son raisonnement.

Mais Ray Banana tient néanmoins à faire savoir qu'il n'a rien à voir avec cet individu, et que si d'aventure il s'essaie à ajouter un Banana en second prénom à son état-civil, il le poursuivra en justice jusqu'en Nouvelle Zélande, en Tasmanie, où qu'il se trouve.

samedi 5 novembre 2011

25. Keep the markets happy


C'est ballot, Ray s'était bien promis de ne plus nous importuner avec ces histoires de marché qui ont tendance à l'obséder. Mais il faut bien avouer qu'il n'est pas le seul, et voilà que, depuis la riante Côte d'Azur, l'actualité s'impose encore une fois à lui et nous prive d'un sujet d'étude plus passionnant.

C'est juré, la prochaine fois il nous entretiendra de météorologie, ou de la classification des espèces, c'est selon.

mardi 1 novembre 2011

Un singulier patronyme

Banana, voici un nom qui peut sembler difficile à porter, sous prétexte qu'il évoquerait immédiatement le singe qui sommeille en nous.


Et effectivement, chez l'occidental ordinaire, le mot fait aussitôt naître l'image de Tarzan, Cheetah, et toute la petite famille dans les arbres.



Les voici donc, pour qu'on n'en parle plus, avec dans le rôle de Tarzan, de haut en bas (et dans un ordre inverse à la chronologie des films) Gordon Scott, Lex Barker et Johnny Weissmuller.
Mais Ray Banana, qui pense de toute manière que l'homme n'est qu'un animal comme les autres, comme il s'en expliquera bientôt, ne s'arrête pas à ces broutilles. Et, son second prénom étant Milton, il est bien sûr familier avec le concept de paradis perdu qui sous-tend l'univers de Tarzan.

Dans le domaine des relations humaines, le terme banane, au figuré, a un accent moqueur certes, mais plutôt affectueux. Du français "Va donc, eh, banane!" à l'anglais "You big banana..."
... accent néanmoins plus sarcastique quand Marilyn Monroe lance à ce policier la réplique qui fit d'elle une star "Haven't you bothered me enough, you big banana-head?" (The Asphalt Jungle, 1950)


Quant aux éventuelles connotation sexuelles qu'on veut bien lui prêter, rappelons, puisque nous sommes dans le cinéma, que Mae West n'a jamais dit, comme on le répète parfois "Is that a banana in you pocket, or are you just happy to see me", mais "Is that a gun in your pocket...", ce qui est plus drôle, surtout qu'elle l'aurait dit non pas dans un film mais à un vrai policier venu l'escorter à la gare de Los
Angeles.



En politique, on peut noter le sens résolument péjoratif de l'expression banana republic, ou république bananière (comme dans "La France est-elle en train de devenir une république bananière?")

Mais finalement, dans le champ (comme on aime à dire dans les cercles intellectuels) de l'art, le mot banane fait vite surgir cette icône pop au carrefour de la musique et de la peinture...




Grâces soient rendues au Velvet et à Andy Warhol, Ray est donc tout à fait à l'aise avec son nom de famille.

mercredi 19 octobre 2011

23. Faire un pas de côté



Quand la situation semble inextricable, la solution hors de portée, il peut être bénéfique de faire un pas de  côté.

Remarquons que Ray vient ici de tenir la promesse faite il y a quinze jours. Le philosophe, au contraire du politicien, a tendance à tenir ses promesses (NdT).


mercredi 5 octobre 2011

Apollo 18 sur le pas de tir




Ray Banana nous fait savoir que son absence momentanée, annoncée dans son message du 25 août, risque de se prolonger encore une quinzaine de jours.

Tout à fait à l'impromptu, il a pris la décision de s'embarquer pour un bref voyage sur la lune,  dont il compte tirer parti pour élargir ses horizons. 
On le voit ici comme il vient de prendre place dans sa capsule Apollo, bien protégé et prêt au départ. 

En attendant, comme il sent ses horizons commencer déjà à s'élargir, il nous livre une de ses maximes, qu'il compte développer à son retour :
"Pensez hors du sac !"

(Sculpture et photo Liza Benoit)

vendredi 23 septembre 2011

La philosophie dans les montagnes, suite

Nous en étions restés là:
Tout ceci nous éloigne bien de Ray Banana et de la philosophie... 



Pas du tout, disions-nous, et voici pourquoi:
Quand passa la mode des chapeaux en poil de castor (la mode, encore elle), et d'ailleurs il ne restait carrément plus un castor dans les montagnes, tellement ils avaient été efficaces, nombre de mountain men se tournèrent vers d'autres activités. Old Bill Williams, par exemple, rejoignit en 1840 une importante bande qui depuis quelques années se livrait au vol de chevaux à grande échelle en Californie, pour les revendre au Nouveau Mexique. Qui, comme la Californie, faisait encore partie du Mexique tout court à l'époque (Old Mexico, comme dirent ensuite les Américains pour le distinguer du nouveau). Cette bande, qu'on appelait les Chaguanosos, était dirigée par un autre trappeur, sans doute une vieille connaissance, un Canadien français nommé Jean-Baptiste Chalifoux (1791 ou 1792 - 1860) dit aussi Baptiste Brown, ce qui était plus simple.


Or ce même Chalifoux est un des trois personnages principaux de Rio de Las Animas, une histoire de Ray Banana, qui sera peut-être achevée et publiée un jour.

Ray le rencontre peu après le début du récit, et arpente en sa compagnie la vallée de la rivière en question. Chalifoux et lui échangent à loisir des considérations bien senties sur les mystères qui nous dépassent, qui sommes nous - où sommes nous - où allons nous et tout ça. Et comment se fait-il qu'ils puissent se côtoyer  et discuter ainsi alors que l'un a dû mourir une centaine d'années avant que naisse l'autre. Cette question là, notons le, trouvera sa réponse avant la fin du récit.
Voilà pour Ray Banana et la philosophie.

Il n'existe pas de photo de Jean-Baptiste Chalifoux, mais pour compenser en voici une de son ami Charles Autobees (1812-1882), lui aussi Canadien français d'origine (et né d'une mère indienne Delaware). Comme pour Chalifoux, son vrai nom, qui était plus probablement Hurtubise, voire Heurtebise, a  été transcrit phonétiquement de cinq ou six façons différentes par les Anglo-Saxons, pour nous rester sous celle-ci, Autobees.



Remarquons que Hurtubise, Heurtebise, cela nous ramène à Jean Cocteau - l'ange Heurtebise dans Orphée - et donc à une citation fameuse déjà croisée dans ces colonnes, et ces mystères qui nous dépassent.

jeudi 15 septembre 2011

Ed Ruscha, Williams, Arizona, et la philosophie dans les montagnes



Williams, Arizona, doit son nom à Old Bill Williams, né William Sherley Williams (1787-1849), trappeur, guide et mountain man. J'emploie volontairement le terme anglo-saxon mountain man, plutôt que le français montagnard, qui évoque plus un berger sur l'alpage ou un moniteur de ski qu'un type qui gagne sa vie à patauger dans l'eau jusqu'à mi-cuisses pour poser des pièges à castor. En français (et plus des trois quarts d'entre eux étaient d'origine française, on disait d'ailleurs voyageur, ou engagé, suivant leur statut social.
En plus de la ville, Williams a donné son nom à une rivière et une montagne, ce qui montre la considération dans laquelle le tiennent les habitants de l'Arizona. D'ailleurs la ville lui a élevé une statue, justement face à une station-service.


Le sculpteur l'a représenté portant la barbe, mais l'aquarelliste Alfred Jacob Miller, qui l'a dessiné de visu en 1837, le montre glabre, quoique mal rasé. Les mountain men, d'ailleurs, portaient très rarement la barbe, en partie pour éviter les poux. Et surtout parce qu'elle n'était pas du tout à la mode dans la première moitié du XIXème siècle. Et ils avaient beau passer une bonne partie de leur temps dans les montagnes ou en famille chez les indiens (glabres eux aussi), ce n'est pas pour autant que ces types là ignoraient les modes.



Quand à la station service auprès de sa statue, une Conoco, difficile de voir si elle a remplacé depuis la seconde station photographiée par Ruscha à Williams, une Mobilgas, ou si c'en est encore une autre. Auquel cas on pourra dire que Williams est une ville où on a vraiment le choix, pour faire le plein.



Tout ceci nous éloigne bien de Ray Banana et de la philosophie, dira-t-on.
Pas du tout, et voici pourquoi: quand passa la mode des chapeaux en poil de castor...
(A suivre)

lundi 5 septembre 2011

Sunset Tower, Edward Ruscha, et une histoire

Revenons un instant à Sunset Tower, cette "address of distinction" occupée par Ray Banana durant sa période classique. Ecoutons Ray:
"En déplacement à Bruxelles vers 1980, mon biographe, M. Benoit, acheta dans une librairie de la rue des Eperonniers, trois petits livres de Edward Ruscha, en se disant "Tiens, voilà de la bonne doc!"
 


Sur le premier, le mythique Every Building On The Sunset Strip, il put noter l'adresse exacte du Sunset Tower building, dont il avait déniché une autre photo dans une autre "doc".




Il ne repéra pas la station-service Standard qui lui fait presque face, dans cette photo de 1933, qu'elle ait été soit détruite soit transformée en 1966, quand Ruscha photographia tout le Strip.


Par contre il découvrit, dans le deuxième livre de l'artiste, Twenty Six Gasoline Stations (le troisième étant Some Los Angeles Apartments) une station-service Standard presque identique, située elle à Williams, Arizona.



Quand il dut peu de temps après illustrer une publicité pour les vols Air France vers Los Angeles, il pensa que cette station Standard conviendrait tout à fait à ce qu'il imaginait, une fois entourée de quelques éléments d'architecture vernaculaire qui lui semblaient typiquement "angeleno" et même "Sunset Strip", cette portion du boulevard qui lui paraissait, puisque c'est là que j'habitais, résumer l'esprit de la ville.
On retrouve donc dans son dessin plusieurs détails identifiables de la station de Williams photographiée par Ruscha en 1962.


Ceci étant, Williams, Arizona – 2266 habitants à l'époque – n'a pas grand chose à voir ni avec Los Angeles ni avec Metropolis.

Mais cela il ne l'apprendrait que plus tard. En 1997, en route pour le Grand Canyon, il passa une nuit à Williams, dans un motel nommé comme il convient le Canyon Motel. Au petit matin, avant le petit déjeuner, il décida d'aller faire le plein de sa voiture de location, car il prévoyait pour la journée une étape d'au moins 350 kilomètres, jusqu'à Kayenta. Et il se rendit précisément à la station-service Standard de Twenty Six Gasoline Stations, où dans les années 1990, on était passé au self-service. Là, il s'escrima pendant vingt secondes avec la pompe, qui refusait de lui délivrer la moindre goutte, avant d'être secouru par deux jeunes Navajos qui passaient par là, le genre cool et cheveux au milieu du dos. Ils lui expliquèrent qu'il fallait aller d'abord au bureau, payer d'avance ou juste passer sa Visa dans la raclette, un truc comme ça. La prédestination avait parlé. 

Williams, 21 août 1997


Mais de tout ceci il n'eut pas non plus conscience sur le moment. Il ne le sut que des années après, en feuilletant à nouveau le livre de Ed Ruscha, et quand lui revinrent les souvenirs du Canyon Motel, où la moquette bouclée était aussi épaisse qu'elle était ancienne et douteuse, au point qu'on hésitait un peu à s'y déplacer pieds nus.


Canyon Motel


Quant à la station-service, elle était restée gravée dans sa mémoire, rapport à la pompe et aux deux indiens."



jeudi 25 août 2011

Le philosophe est un citoyen comme les autres


Pris par la vie quotidienne du héros de fiction - sortir dans la rue en robe de chambre, enfoncer des portes, 


rencontrer des piliers,


ou en avoir plein les bottes...


... Ray n'a pas forcément le loisir de se consacrer aux questions fondamentales autant qu'il le voudrait.
Dans les semaines à venir, par exemple, il risque d'être plus qu'occupé par la rédaction de sa déclaration d'impôts, et le rythme de parution de ses Pensées improbables en sera ralenti d'autant. 
Il s'en excuse par avance auprès des amateurs.

Quant à ceux qui objecteront que ce n'est pas la saison pour faire sa déclaration d'impôts, vivent-ils eux-même à Pitcairn, comme lui? Vraisemblablement pas. Que connaissent-ils donc au calendrier administratif de Pitcairn?



Pour remédier à cette lacune, Ray Banana les invite cordialement à venir lui rendre visite, s'il le souhaitent, et découvrir cette perle des mers du sud.
Ils trouveront ci-dessous une vue de l'approche sur l'îlot, pour bien le reconnaître. 
Le moment venu, ils pourront ainsi s'assurer qu'ils accostent sur le bon (le transport aérien n'est pas fourni).


Les dessins sont extraits de 60 Ray Banana (en ligne pas si claire). Voir ci-contre.


samedi 20 août 2011

Ray Banana s'interroge sur le cours du destin



Même en vacances, en voyage culturel ou touristique, 
Ray ne perd pas une occasion d'approfondir les questions les plus sérieuses.