La dernière réflexion de Ray Banana, Le dedans et le dehors, a suscité plus d'une interrogation chez ses lecteurs. A vrai dire, Ray lui-même n'est pas totalement persuadé d'adhérer à ce qu'il vient d'énoncer.
Aussi, pour les esprits cartésiens qui ne se satisfont pas d'une intuition, aussi fulgurante soit-elle, ou de l'évidence d'un haïku, il propose d'aborder la question sous un autre angle.
© Blake et Mortimer |
Pouvons nous ou non dépasser notre subjectivité? Est-elle si naturelle qu'il nous paraît? Peut-être cela dépend-il de notre degré de perméabilité. Pour la plupart d'entre nous, nous situons notre je vers la zone du cerveau qui analyse les signaux transmis par notre nerf optique, bien à l'abri dans notre boite crânienne. Nous pourrions faire la comparaison avec le jaune d'œuf fécondé, embryon bien à l'abri derrière une bonne épaisseur de blanc, une fine membrane, une mince couche d'air et une coquille de calcaire. Plongé dans l'océan, l'œuf ne percevra pas grand chose de cet environnement. Au contraire, par exemple, de l'éponge, organisme tout aussi vivant mais d'une bien plus grande perméabilité. Il est tout à fait légitime, pour les éponges, d'affirmer: "Regardons en nous même et nous verrons le monde".
On peut aussi pousser la comparaison jusqu'à évoquer le sous-marinier et le plongeur en apnée. Rappelons qu'alors que le contact de l'air, hors tempête ou températures extrêmes, nous est presque imperceptible, au contraire de celui de l'eau. Le sous-marinier, à l'abri derrière une bonne épaisseur d'acier, a emmené son air avec lui. Ses contacts avec son environnement sont d'une extrême pauvreté, limités à ce que lui montre son périscope et au lancinant écho du sonar. A côté, l'apnéiste voit, entend et perçoit tout un univers où il se dilue "comme un poisson dans l'eau".
Il est donc recommandé au lecteur qui désirerait mieux pénétrer la pensée de Ray d'envisager quelques plongées qui lui permettront aisément de dépasser sa subjectivité.